Il n’existe pas d’institution scientifique publique autonome dans le débat politique. Quelles en sont les conséquences, en contexte de pandémie et de changements climatiques ?
Changements climatiques, pandémie : les scientifiques devraient pouvoir informer le public librement
Antoine Lemor, Université de Montréal et Sarah M. Munoz, Université de Montréal
Publié: 19 octobre 2023, 15:21 CEST
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Pour la création d’institutions scientifiques publiques autonomes
Le public devrait pouvoir être librement informé par les scientifiques.
Or, l’inexistence dans le paysage politique d’institutions scientifiques publiques autonomes l’en empêche, et non sans conséquences. Durant la pandémie, elle a eu un effet négatif sur l’adhésion de la population, qui a commencé à questionner la légitimité des experts. Dans le cas des changements climatiques, l’instrumentalisation du discours scientifique restreint le débat public, et dépolitise les enjeux climatiques au profit de la satisfaction d’intérêts privés.
Nous proposons donc d’étendre l’autonomie d’institutions scientifiques publiques comme l’INSPQ. D’une part, en instaurant la possibilité de communiquer librement leurs recommandations au public, en dehors de toute tutelle. Et d’autre part, en permettant la formulation de demandes citoyennes de rapports ou de recommandations scientifiques de la part du public sous la forme de pétitions.
Ceci permettrait d’ajouter une « troisième voix » au débat politique, qui informerait le débat en permettant au public de faire un choix libre et éclairé. Mais cela permettrait également d’apporter un discours alternatif au discours partisan et à la polarisation, sans pour autant le remplacer.
Des auteurs comme Zynep Pamuk proposent également la création de « tribunaux scientifiques » composés d’experts et de citoyens. Ces tribunaux saisis par initiative citoyenne statueraient sur des problèmes publics mobilisant des connaissances scientifiques, comme la pandémie ou les changements climatiques. Suivant le modèle judiciaire, un jury composé de citoyens voterait sur une proposition de politiques publiques – par exemple, devrions-nous interdire la voiture à essence en ville ? – au terme d’une procédure contradictoire impliquant des vues opposées d’experts dans le domaine.
Si ces solutions ne sont pas à écarter, bâtir sur des institutions préexistantes et leurs solides expertises en leur offrant une place plus importante dans le débat apparaît une solution réalisable à court terme, et qui étendrait à la science le principe démocratique.
Une solution qui tirerait les leçons des crises récentes, dont la pandémie.
[Image] L'érosion des côtes de Louisianne. Alex Kolker/SouthWings
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- Pour une autorité publique indépendante dans le domaine de l’environnement. Actualité juridique. Droit administratif (n°23). p. 1201.
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